Changer le monde à sa manière, c’est le rêve de nombreux entrepreneurs. Mais une idée n’a de sens que pour ceux qu’elle touche. Certains d’entre eux ont choisi d’impliquer plus que leurs clients dans leur projet, et de s’inventer créateurs de liens. Ce défi est de taille lorsqu’on lance tout juste son entreprise, mais il est le moteur de ceux qui franchissent le pas. Alors que le nombre des créations d’entreprises affiche une hausse de 21% par rapport à juin 2017, découvrez quatre projets ambitieux lancés avec, et pour, les autres.
Pour Donia, Loubna et Youssef, se retrouver autour d’une table signifie plus que partager un moment de plaisir. Si les trois co-fondateurs de Meet My Mama sont des passionnés de food, leur projet vise aussi à accompagner les femmes vers l’entrepreneuriat. La startup propose un service de traiteur spécialisé dans les cuisines du monde. Brunchs, déjeuners et cocktails sont préparés par les Mamas qui ont rejoint l’aventure sous le statut d’auto-entrepreneures. Chaque prestation est l’occasion d’une rencontre avec les saveurs d’une autre culture, et l’histoire d’une femme talentueuse. Expatriées, immigrées ou réfugiées, les Mamas sortent de l’isolement grâce à leur passion pour la cuisine.
Mais la mission de Meet My Mama dépasse celle d’un service de traiteur classique. Cours de gestion d’entreprise, de français ou encore de design culinaire sont proposés aux Mamas qui souhaitent développer leurs compétences. Et la startup, déjà rentable, envisage de lancer un fond d’investissement destiné à financer leurs projets entrepreneuriaux. Il nous tarde de goûter à leurs prochaines créations !
Loin des codes de la friperie classique, BIS Boutique Solidaire pourrait bien convaincre les réfractaires de la chine. Serait-ce l’effet du parquet à chevrons, de l’éclairage soigné ou du logo en néon ? Ici, les vêtements s’affichent en pleine lumière sur des cintres en bois assortis, dans un cadre plus proche du concept-store épuré que du dépôt-vente aux portants surchargés. Et les pièces présentées, toutes de qualité, s’achètent pour 5 à 15% de leur prix de vente initial. Les amateurs de vintage se pressent dans ces deux adresses à chaque nouvel arrivage.
Le projet, lancé par Rémy Antoniucci en 2012, comprend aussi un atelier où sont triés les vêtements achetés à différentes associations de collecte. Depuis le début de BIS en 2012, plus de 100 personnes en situation professionnelle ou personnelle difficile se sont succédées dans son équipe. Elles y sélectionnent les pièces de créateur qui rejoindront les boutiques du boulevard du Temple et de la rue Lamartine, et celles qui seront redistribuées gratuitement aux associations partenaires du projet. Les vêtements restants sont recyclés, en accord avec l’éthique qui anime BIS.
Soutenir les commerçants locaux en leur restant fidèles, en théorie, c’est simple. Mais pour les citadins pressés, difficile de trouver le temps de parcourir son quartier à la recherche des derniers légumes primeurs ou du plus beau pain au levain. Cette réalité, Elsa Hermal et Edouard Morhange l’ont connue aussi. Et elle leur a soufflé l’idée d’Epicery, leur startup food lancée fin 2016. Inspirés par les plateformes de livraison qui connectent les clients aux restaurants d’à côté, ils ont lancé cette marketplace réservée aux commerçants du coin, du boulanger iconique à la petite épicerie italienne du bas de la rue. Les clients n’ont qu’à passer commande en ligne sur le site ou l’application avant de se faire livrer à l’adresse de leur choix.
Epicery permet à plus de 350 commerçants de développer leur clientèle locale, en leur offrant une plus grande visibilité en ligne et un service de livraison par coursiers à vélo. Un outil de gestion des stocks leur est également fourni par la startup, qui se rémunère grâce à une commission prélevée sur les commandes passées via la marketplace. Les commerçants de Paris et Lyon, les deux villes où Epicery opère aujourd’hui, peuvent voir leur chiffre d’affaires augmenter jusqu’à 30%, preuve que la startup offre une solution efficace pour développer le commerce de proximité.
Dans les ateliers de Montmartre, les touristes amateurs d’art ont remplacé les artistes. Pour les trouver, il faut descendre de la butte et prendre la direction de la rue Jean-Pierre Timbaud, centre névralgique du XIe arrondissement. Dans le grand bâtiment industriel qui abrite le Onzième Lieu, la lumière est généreuse et l’on prépare ses toiles sous une grande verrière, mais le loyer est plus accessible qu’autour de la place du Tertre. Et surtout, on crée en bonne compagnie.
Faire se rencontrer les artistes et les travailleurs nomades, tel est le pari du Onzième Lieu. Né de l’imagination de Nathalie Riché, Camille Cottet et Marie Roussel, cet espace hybride de 700 mètres carrés regroupe un café où s’installent les visiteurs de passage, de grands bureaux loués au mois, des ateliers individuels, une grande fabrique à partager et un studio photo. De nombreuses rencontres et débats rythment les journées des résidents de ce lieu où les échanges sont encouragés, au-delà de ses murs. Avec son association, les Ateliers Parallèles, l’équipe du Onzième Lieu contribue aussi à la vie culturelle locale grâce à des événements et des expositions ouverts aux habitants du quartier.
Par Clémence Gruel